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le blog de la fille au chomage

Le blog de la fille au chômage c'est juste un blog, avec une fille dedans. Une fille dedans au chômage.

"- Ce n'est qu'un début, continuons le combat ! - Alors que c'était qu'un combat, y fallait continuer le début."

Publié le 17 Octobre 2012 in chomage

"- Ce n'est qu'un début, continuons le combat !               - Alors que c'était qu'un combat, y fallait continuer le début."

 

« Attention mesdames et messieurs !

Je requière toute votre attention pour cette annonce exclusive ! Une promotion de ouf ! Une offre à ne pas manquer ! Attention attention messieurs dames, voici la grande nouvelle du mois d’octobre : Ce mois-ci, la fin du mois commence le 10 ! eh oui, c'est déjà l'heure d'en arrondir la fin : pas de beurre et pas d'épinards!

Vous avez bien entendu ! LA FIN DU MOIS DEBUTE AU 10 DU MOOOoooi… »

- Zap -

J’éteins la radio. Les nouvelles ne m’affriolent guère.

Au menu aujourd'hui : « le péril jaune est reporté pour cause de pluie" - « la Castaphiore a attrapé un rhume » - « la fin du monde ne devrait pas tarder »

et je suis toujours au chômage.

J’ai mal à la tête parce que j’ai battu mon propre record de pages consultées sur indeed : 69 et rien d’excitant. Le mot « commercial » revient souvent, ainsi que « comptable » et « agent de recouvrement du Trésor »… J’hésite à me suicider.

Evidemment si cela ne tenait qu’à moi je ne m’emmerderai pas à chercher du boulot. Mais le monde est mal fichu ma p’tite dame. J’ai besoin d’argent parce qu’être pauvre ça craint.

J’avais un voisin jadis. J’avais un voisin jadis qui était un peu fou. Un peu dérangé, un peu fêlé, vaguement perché. Il passait ses journées en bas de l’immeuble à engueuler les gens ou à parler tout seul. Si on avait un peu de courage -les jours de bonnes humeurs- et que l’on s’accrochait à l’une de ses conversations, on entrait dans le monde perché du voisin d’à côté : peuplé de complots et de souvenirs flous... On y découvrait son ex-femme et son meilleur ami sdf, son amour pour l’Histoire et sa maladie. Sa vieillesse aussi. Le voisin d’à côté criait souvent au complot mais c’était plutôt bon signe. Lorsqu’il ne criait plus, la rue s’aseptisait et les gens recommençaient à faire comme si de rien n’était…

« De rien n’était » est une étrange expression non ? C’est la première fois que je l’écris.

Disons plutôt que les gens recommençaient à n’avoir l’air de rien.

Un jour le voisin d’à côté a cessé de hurler. Il était toujours là, en bas, en bas de chez moi, mais il ne disait plus rien. Alors on est allé le voir inquiets. Et il nous a dit qu’il suivait un traitement. C’était la première fois que le fou n’était plus fou et j’ai compris d’un coup pourquoi il l’était : sans sa folie l’homme était triste. Si triste et si seul et si conscient d’être seul. Je me demande ce qu’il est devenu…

Je me demande pourquoi je raconte ça. Ah oui ! Le voisin d’à côté lorsqu’il était encore fou et qu’il ne suivait pas de traitement, il m’appelait toujours « jeune fille de bonne famille » et ça m’énervait. Ca m’énervait parce qu’il ne savait rien de moi et que j’avais des principes et que je voulais surtout pas qu’on m’appelle comme ça.

Aujourd’hui que je suis pauvre je comprends un peu mieux ça, parce que papa-maman payaient les études, les factures, les cigarettes… Parce qu’aujourd’hui je fais les fonds de cendrier pour trouver les mégots mal finis, les dessous de canapé pour retrouver les pièces perdus et la potiche dans les congrès de gens riches pour me payer des cours au cned.

La pauvreté a l’avantage de vous donner la notion de l’argent, elle vous met également au fait de votre dépendance au tabac, de votre dépendance au jus de fruit le matin, au chauffage en hiver, au café de bonne qualité. Elle vous offre la conscience de ce que vaut votre santé, de ce que vaut la sécurité de votre habitat et celle de votre voiture. Elle vous rappelle que communiquer et s’informer n’est pas aussi bon marché que ce que vous laissent croire les fournisseurs adsl. Elle vous informe que se déplacer dans ce monde en mouvement vous coûte un bras ou deux, que la culture n’a rien à foutre dans vos préoccupations, que la déco est une chose atrocement superficielle et que la mode j’en parle même pas...

La pauvreté, finalement, c’est cette petite entité créée pour vous dire à quel point les choses indispensables et naturelles à ce monde ne vous sont pas accessibles. Que vous n’avez donc, par extension, rien à foutre dans ce monde ci. Fait pour d’autres.

Mais puisque vous ne pouvez évidemment pas vous résoudre à foutre le camp, deux expédients s’offrent à vous : l’emprunt et la frustration.

Et sur la grande pente de l’évolution, ces deux facteurs viennent s’ajouter aux autres pour nous ramener à l’un des gros titres du journal radiophonique ci-dessus :

« La fin du monde ne devrait pas tarder ».

 

 

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